Responsable et en perpétuelle évolution – procure.ch

Responsable et en perpétuelle évolution

publié le l'auteur: Laurent Chavaz

Acheter d’une manière responsa­ble et durable est une réelle montée en maturité dans notre fonction d’acheteur au quotidien.

La fonction achat a évolué en Suisse et cela n’est pas près de s’arrêter vu les défis auxquels nous sommes actuellement confrontés. Inflation, coût de l’énergie, pénurie de matière première, pénurie dans les transports (chauffeur de camion, pilote d’avion). Et après? Difficile de prédire l’avenir, mais l’important est de savoir réagir à une situation chaotique pour affirmer notre rôle dans les décisions stratégiques et durables.

Si l’on fait une rétrospective des achats sur ces 20 dernières années nous pouvons constater que les achats sont en perpétuelle évolution. A l’époque, les achats étaient très souvent assimilés à des passeurs de commandes, tout simplement, car il y avait très peu de culture d'achat dans les entreprises et peu de personnes formées à ce métier. Seules les grosses multinationales avec des achats et une Supply Chain intégrés au départ des projets pouvaient se dire matures. 

Pour les autres entreprises, l’achat intégré au départ des projets était une notion plus qu’une réalité car elles ne percevaient pas la réelle valeur ajoutée de mettre notre fonction au début des discussions, lors de la définition des besoins. Il était ainsi beaucoup plus simple de demander à un acheteur/acheteuse d’acheter une Audi Q5 plutôt qu’un 4x4 avec telle et telle spécification. Cette réalité est encore vraie de nos jours selon le milieu où nous exerçons notre métier d’acheteur. 

Un environnement qui influence la manière d’acheter

Les acheteurs, au même titre que les vendeurs, les financiers ou les RH, souhaitent eux aussi monter en compétences et en maturité, mais tout va dépendre de l’environnement dans lequel ils évoluent:

  • Entreprise privée ou publique (le public commence à considérer les achats grâce aux restrictions budgétaires) 
  • Secteur d’activité de l’entreprise: automobile, grande distribution, chimie (des pi­onniers)
  • Taille de l’entreprise: PMI, PME, Multinationale
  • Positionnement des achats au comité de direction

Savoir s’ouvrir  pour s’adapter et agir

Un regard externe permet de poser un diag­nostic, faire une analyse approfondie (données; processus; identification des leviers d’optimisation; gain et risques) et mettre un plan d’action en place.

Mais il y a un  levier externe du changement qui réveille par-dessus tout les consciences de nos dirigeants: ce sont les crises. Crise climatique, crise financière, pandémie et aujourd’hui la guerre en Ukraine. Des épreuves qui nous obligent à nous remettre en question, à tester la résilience de nos organisations et de nos processus ainsi qu’à revoir nos objectifs achats.

Qui aurait pu imaginer un confinement mondial avec des usines à l’arrêt; des milliers de containers bloqués en Chine et des avions cloués au sol! Un vrai cauchemar et de ­bonnes migraines, mais pas de Paracétamol car il est fabriqué à 65% en Asie.
Avant, les entreprises dites matures dans les achats avaient comme objectif n°1 de réduire les coûts (avec des politiques d’externalisation dans les pays Low Cost) .

Aujourd’hui, la situation mondiale que nous connaissons et les enjeux climatiques sont de réelles opportunités pour revoir ces objectifs et valoriser notre fonction afin d’être un acteur majeur du changement. Plus un Business Partner (BP) qu’un Cost killer.

La monté en maturité

Développer la maturité de la fonction achat n’est pas un long fleuve tranquille, mais comme l’a précisé M. Vincent Laplante (ex CPO du groupe Richemont) lors d’une conférence: la maturité doit se faire avec les autres, pas en vase clos.

Il faut savoir être opportuniste, choisir le bon moment pour faire grandir sa maturité achat et se mettre des objectifs ambitieux tout en mettant les priorités où elles doivent être selon le niveau de maturité de notre direction.

Etre mature dans les achats sur une échelle de 1 à 4 permet de mesurer sa marge de progression. Toutefois, il ne faut pas oublier notre réalité et souvent revenir au basique des achats: les besoins et la stratégie de l’entreprise.

Nous entendons souvent parler d’industrie 4.0; Supply Chain 4.0, voire même SAP 5.0, mais le point fondamental consiste à obtenir de la data de qualité; de définir et valider les processus afin de mettre des outils adéquats pour aboutir à un monde digital.

Les smartphones sont omniprésents, les clients veulent acheter en un clic via des catalogues B2B ou B2C. Il suffit de regarder le business modèle du groupe Amazon pour comprendre où seront les acheteurs stratégiques de demain.

Nous sommes responsables

Le réchauffement climatique n’est plus une vue d’esprit mais malheureusement notre réalité au quotidien. Rappelez-vous quand nous étions tous confinés (rue vide; pollution au niveau le plus bas.). Inutile de faire du Greenwashing pour nous donner bonne conscience et travailler son image, il faut agir avec des actions concrètes.
Nous parlions précédemment des quatre niveaux de maturité des achats, mais n’y aurait-il pas le niveau 5: les achats durables?
Les achats responsables sont encore trop peu développés à cause du manque de formation, mais aussi car cela peut rentrer en contradiction avec notre objectif de départ qu’est le prix.

Un achat responsable (ou durable) est un achat:

  • Qui respecte l’être humain
  • Qui tient compte des exigences de la protection de l’environnement
  • Qui favorise le développement économique par la recherche d’efficacité, d’amélioration de la qualité et d’optimisation globale des coûts.

Les 3 grandes étapes:

  • Engagement de la Direction et évaluation des besoins
  • Mise en place d’un plan d’action pour l’intégration du développement durable dans les achats (processus d’amélioration continue)
  • Prise en compte du développement durable dans les appels d’offres (avec une pondération) et sélection des offres au meilleur rapport «qualité/prix» sur la durée de vie du produit.

Privilégier un Sourcing européen vs asia­tique (dans la limite du possible), choisir des moyens de transports plus écologiques (train vs camions) et privilégier des produits plus respectueux de l’environnement (qui consomment moins d’énergies; avec des ma­tières premières plus écologique). 

Laurent Chavaz

L’auteur est consultant independent & respon­sable des achats dans une société de Facility Management. Il a évolué depuis 20 ans dans le milieu des achats directs et indirects dans le secteur de l’horlogerie; de la chimie; de l’industrie.